Savez-vous qu’en dehors des questions pièges, il existe aujourd’hui quelque chose de beaucoup plus insidieux : l’analyse de tous vos gestes, mouvements ou postures que vous pouvez avoir lors de cet entretien d’embauche ?
Vous vous grattez l’oreille ? Vous croisez les bras ? Vous grignotez le bout de votre stylo ? Vous battez la mesure avec le pied droit ? Attention ! Ces gestes ne sont pas insignifiants : ils révèlent vos états d’âme à tel ou tel moment de l’entretien…
Ainsi, un candidat est en face du recruteur en position d’écoute active : il a le tronc penché en avant, les mains et bras ouverts vers le recruteur comme s’il voulait attraper ses paroles, etc. Bref, il est ouvert au dialogue. Puis soudain le recruteur lui pose une question, et là, brusquement le candidat se met en position d’écoute passive : il se rejette en arrière, croise les bras (geste de protection très fort) et la crispation des mains est telle que l’on voit ses doigts blanchir sous l’effort. En clair, le recruteur vient de lui poser une question majeure, une question embarrassante qui lui est extrêmement désagréable…
Ces comportements parasites peuvent être les plus divers : certains individus torturent leur stylo, leur porte-documents, etc. En réalité, c’est le recruteur qu’ils ont envie de torturer. Certes, les entretiens d’embauche sont très stressants puisqu’il s’agit de décrocher un emploi. Or, ces stress ou ces anxiétés laissent toujours le champ libre à toute une série de comportements et de micromouvements.
Cette méthode du « décodage du comportement » en a répertorié trois séries :
Les micromouvements de « régulation agressive »
Ce sont les plus fréquents car tout entretien d’embauche est porteur de tension. Le candidat sent qu’il a peut-être « gaffé ». Seulement il ne peut laisser éclater cette tension extérieure. Force est de trouver une soupape. Alors il va mordiller son crayon ou griffonner un papier. Si l’on pouvait fixer un manomètre au bout du crayon à mine on y verrait parfois un degré de pression étonnante : une tension qui peut aller jusqu’au bris de la mine.
En réalité, faute de pouvoir casser la tête du recruteur, le candidat se contente de casser la mine. Autre exemple : le recruteur donne sa carte de visite au candidat. Le recruteur s’attend à ce que le candidat l’honore, or les recruteurs sont consternés par ce qu’ils voient : certains la plient en deux, d’autres se curent les dents avec ; tout juste si les candidats ne mangent pas cette belle carte qui porte le nom d’un recruteur. Voilà qui correspond, de la part des candidats, à une tentative très nette « d’anthropophagie » à l’égard des recruteurs !…
Les micromouvements de « régulation affective »
Le candidat les déclenche en général pour compenser un moment pénible de l’entretien. Ainsi, un candidat interrogé sur le résultat de ses études répond qu’il a tout raté en se passant les mains sur le visage et en se caressant les cheveux. Ce geste de douceur compense bien sûr une question embarrassante. A défaut de sa mère derrière lui pour lui caresser les cheveux, il l’a fait lui-même. Fumer fait aussi partie de ces mouvements de régulation affective car le contact avec la cigarette est très doux. Le fumeur est en pleine tétée; c’est superbe. Fumer la pipe en revanche correspond à un mouvement de régulation agressive forte. Cela peut paraître curieux, car les fumeurs de pipe sont en général placides. En réalité, les fumeurs de pipe ont une capacité intérieure de révolte et d’éclat, mais ils utilisent toute une série de mouvements civilisés pour que l’on ne s’en aperçoive pas. Ils ne sont donc pas, selon l’auteur de cette surprenante méthode de décodage du comportement, des êtres paisibles et doux. Ce sont au contraire des révoltés fort bien dominés ou subjugués par eux-mêmes.
Les micromouvements de « régulation attentive »
Ils permettent d’écouter plus longuement un interlocuteur au prix d’une moindre fatigue nerveuse. Par exemple : les petits dessins ou graffitis que l’on fait sur un papier tout en écoutant quelqu’un ou le stylo que l’on n’en finit pas de démonter. En griffonnant ainsi le recruteur ne consacre que 50 à 60 % de son attention à l’écoute du candidat. Il fait une « dérivation », il se met en court-circuit, ce qui permet une écoute plus longue, meilleure, mais moins forte.
Pour user de cette astuce de recruteur, les candidats pourraient peut-être aussi déconnecter pour être plus à l’écoute des propos des recruteurs et être ainsi moins tendus. Peut-on maîtriser tous ces gestes ou micromouvements lors d’un entretien d’embauche ? Apparemment non, tout comme on ne peut changer son écriture très longtemps.